Henri-Georges Clouzot, un réalisateur en oeuvres

IMG_1464Quarante ans après sa mort, Henri-Georges Clouzot est de retour dans sa ville natale. En écho à l’exposition organisée par son oncle au musée Galliera en 1924, L’art dans le cinéma français, l’exposition du musée Bernard d’Agesci de Niort célèbre l’art visuel en lien avec trois films cultes de la dernière période du réalisateur : Le Mystère Picasso, L’Enfer et La Prisonnière.

« Je ne suis pas un littéraire. On le dit, mais c’est faux. Quand je commence à raconter une histoire, c’est toujours en partant d’un choc visuel subi, pour aboutir à un choc réinventé, à une image déformée et quelquefois, je l’espère, efficace. »                                                                                                     H-G Clouzot à André Parinaud, Arts, n° 552

Ce désir de donner à voir les images mentales qui l’obsèdent est une constante dans l’oeuvre du cinéaste. Cette préoccupation est-elle à l’origine de sa collaboration avec Pablo Picasso ? Le prologue du Mystère Picasso présent dans l’exposition permet de le supposer… « On donnerait cher pour savoir ce qui s’est passé dans la tête de Rimbaud quand il écrivait Le Bateau ivre… dans la tête de Mozart pendant qu’il composait la symphonie Jupiter… pour connaître ce mécanisme secret qui guide le spectateur dans son aventure périlleuse. Grâce à Dieu, ce qui est impossible pour la poésie et la musique est réalisable en peinture… » 

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Photogramme du Mystère Picasso de Henri-Georges Clouzot, 1956

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« Tête de Faune  » de Pablo Picasso, été 1955

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Cahier du Cinéma, n° 60, juin 1956

L’article qu’André Bazin a écrit dans Les cahiers du cinéma à la sortie du film est exposé. Sa lecture est passionnante. Bazin souligne que seul le cinéma est à même de rendre compte des métamorphoses successives d’une peinture telle que la concevait Pablo Picasso. Le rapprochement entre la forme du film de Clouzot et celle des films d’animation expérimentaux m’intéresse particulièrement. Ce texte sera repris dans le recueil, Qu’est-ce que le cinéma ? édité aux éditions du CERF.                                                                                    … Cette conception ne fonde pas le dessin animé sur l’animation à postériori d’un dessin qui aurait virtuellement une existence autonome, mais sur le changement du dessin lui-même où plus exactement sur sa métamorphose. L’animation n’est pas alors pure transformation logique de l’espace, elle est de nature temporelle. C’est une germination, un bourgeonnement. La forme engendre la forme sans jamais la justifier…                                                               Un film bergsonien : « Le Mystère Picasso » de André Bazin, 1956

Dans L’enfer, ce n’est plus la conscience d’un artiste que Clouzot met en scène mais celle d’un personnage. Son scénario tient en une seule ligne. Marcel (Serge Reggiani) est un homme maladivement jaloux de son épouse Odette (Romy Schneider). Clouzot recherche  comment traduire plastiquement la névrose de son héros.

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Photogramme de « L’enfer » avec Serge Reggiani, H-G Clozot, 1964, film inachevé

Recherche désespérée s’il en est, l’obsession du réalisateur rejoignant celle de son personnage. Si le film n’a pu être achevé, les photogrammes et les rushs venus jusqu’à nous grâce au documentaire de Serge Bromberg sont des témoins hallucinants de ce désir de filmer l’intérieur d’un cerveau.

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Photogrammes de « L’enfer », 1964 / « H-G Clouzot, un réalisateur en oeuvres », musée Bernard d’Agesci

Après L’enfer, l’art cinétique est à nouveau sollicité pour le dernier film de Clouzot. Des oeuvres d’Yvaral, d’Antonio Asis, de Nicolas Schöffer et de François Morellet évoquent la galerie fictive de La Prisonnière.

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« Sphère-trames » de François Morellet, 1962 / « H-G Clouzot, un réalisateur en oeuvres », musée Bernard d’Agesci

L’exposition se termine par la reconstitution de l’appartement de Stan, le directeur de la galerie d’art joué par Laurent Tersieff. Joli cadeau offert aux visiteurs de se promener dans un décor de film composé par des oeuvres d’art ayant appartenu à Clouzot et au galeriste Daniel Cordier.

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« Le couple » de Meret Oppenheim, 1956 / « H-G Clouzot, un réalisateur en oeuvres », musée Bernard d’Agesci

Michel Ocelot au Forum des Images

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Michel Ocelot, Jacques Bled et Laurent Valière au Forum des Images, 16 décembre 2017

On peut être le père de Kirikou et galérer pour trouver le financement de son prochain long métrage. Michel Ocelot, invité du Carrefour du cinéma d’animationa conté devant un public conquis la pugnacité qu’il a dû déployer pour faire vivre sa nouvelle héroïne, Dilili.

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Dilili

Convaincu d’avoir écrit un scénario merveilleux, Michel Ocelot est quelque peu décontenancé (le mot est faible) devant la salve de refus qu’il essuie lorsqu’il présente son projet aux partenaires historiques de l’animation. Trois producteurs, les chaînes de TV et même le CNC retoquent son histoire. Plus étrange encore, il reçoit une dizaine de lettres anonymes lui expliquant à quel point son scénario est mauvais.                                      Mis à part la parenthèse enchantée de la production d’Azur et Asmar, Michel Ocelot s’est toujours battu pour défendre ses histoires et face à cette opposition générale, loin d’abdiquer, il commence sans attendre son film en explorant Paris avec son appareil photo.

Michel Ocelot aux égouts de Paris

Michel Ocelot dans les égouts de Paris

Il parcourt un nombre incroyable de kilomètres sur et sous l’asphalte parisien et ouvre les portes de lieux illustres ou plus inattendus recueillant ainsi plus de 17000 photos. Tous les décors du film seront réalisés à partir de ces photographies. Michel Ocelot donne à voir un Paris de la Belle Epoque entre rêve et réalité grâce à d’incroyables décors composites.

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Le salon de Sarah Bernhardt est composé de tentures de l’Opéra, de fauteuils du musée d’Orsay, d’une chaise redessinée par Michel Ocelot…

Michel Ocelot n’aurait pas pu continuer l’aventure seul. Lors de la rencontre, il a tenu à saluer le soutien indéfectible de Jacques Bled des Studios Mac Guff Ligne et a rendu hommage à Virginie Guilminot du studio Les Fées Spéciales. Le film se fabrique entre Paris, Montpellier et Bruxelles.                                                                                               Avant de montrer quelques extraits du film qui devrait sortir sur nos écrans en octobre 2018, Michel Ocelot rappelle les éléments clés de son scénario. Lors de l’exposition universelle de 1900, une fillette canaque, Dilili, est confrontée à un mystère terrifiant. Un groupe de malfaiteurs appelé Les Mâles Maîtres enlève les petites filles de la capitale.

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© Nord-Ouest Films/ Studio O/ Senator Film/Artémis

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© Nord-Ouest Films/ Studio O/ Senator Film/Artémis

© Nors-Ouest Films/ Studio O/ Senator Film/Artémis

© Nord-Ouest Films/ Studio O/ Senator Film/Artémis

Aidée dans sa lutte contre le mal par un jeune livreur en triporteur et par une cantatrice interprétée par Nathalie Dessay, la jeune Dilili va rencontrer un nombre impressionnant de figures illustres de la Belle Époque, des artistes, des scientifiques, des politiques… La part belle est donnée aux femmes avec un trio éclectique composé de l’actrice Sarah Bernhardt, du prix Nobel de physique Marie Curie et de l’anarchiste Louise Michel.              Lors des questions du public, Michel Ocelot précise que son film a été pensé pour la 3D mais pour des raisons économiques la technique d’animation retenue est un savant mélange de 3D et de 2D réalisé avec les logiciels libres Blender et Krita.

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Dans cette séquence du Bateau-Lavoir, deux personnages sont animés en 3D, les autres en 2D… Ils ne font juste pas la même chose…

En attendant la sortie du film, on peut faire une petite balade parisienne en suivant les pas de Michel Ocelot. Il nous souffle la première étape, le square Rappe dans le 7ème arrondissement à la découverture de l’architecte Jules Lavirotte.

Will Eisner au musée de la BD à Angoulême

couvAller présenter Phantom Boy à Angoulême et tomber sur une exposition Will Eisner, la vie vous fait de beaux cadeaux. Cette exposition met à l’honneur son héros Spirit tout en faisant découvrir d’autres facettes de son travail prolifique. J’aurais aimé avoir plus de temps pour lire chacune des planches exposées mais si le but de l’exposition est de créer du désir, le pari est réussi ! Ma découverte de cette oeuvre ne fait que commencer !

Je me suis arrêtée longuement sur les 7 planches de Spirit, Gerhard Shnobble parues en 1948. Venue à Angoulême pour parler d’un héros volant je ne pouvais qu’être attirée par cette histoire. Tout me plaît ! L’insertion de photographies au milieu des dessins, les points de vue incroyables sur New York, la représentation du vol… Le chassé-croisé entre le Spirit et l’obscure employé de banque… La notion du héros classique revisitée…

Spirit, Gerhard Shnobble, 1948

Spirit, Gerhard Shnobble, 1948

Spirit, Gerhard Shnobble, 1948 (détail)

Spirit, Gerhard Shnobble, 1948 (détail)

Spirit, Gerhard Shnobble, 1948 (détail)

Spirit, Gerhard Shnobble, 1948 (détail)

Spirit, Gerhard Shnobble, 1948

Spirit, Gerhard Shnobble, 1948

J’ai été aussi particulièrement intéressée par l’aspect autobiographique d’une grande partie de ses oeuvres…

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Le dessinateur apparaît subrepticement à l’angle d’un page accompagné par un étrange personnage. New York Trilogie

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Quand un auteur annonce à son personnage qu’il a envie de passer à autre chose ! Spirit : the last hero

Quand sa vie professionnelle et personnelle inspire ses romans graphiques.  Le rêveur

Quand sa vie professionnelle et personnelle inspire ses romans graphiques. Le rêveur

Le musée de la bande dessinée d’Angoulême accueille l’exposition jusqu’au 5 novembre. Elle peut être complétée par un passionnant dossier en ligne édité à l’occasion du centenaire de Will Eisner.

La réalisatrice Gitanjali Rao au Forum des images

Workshop de Gitanjali Rao au Forum des images , 4 février 2017

Workshop de Gitanjali Rao au Forum des images , 4 février 2017

Dans le cadre de son cycle India Express, Le Forum des images recevait la réalisatrice indienne Gitanjali Rao. Emerveillée par son court métrage Prainted Raimbow, j’étais très curieuse de découvrir son travail.                                                                          Passionnée d’art, elle est diplômée de l’institut des arts appliqués de Mumbay (ex Bombay). Elle découvre le cinéma d’animation lors d’un festival qui met à l’honneur l’oeuvre du réalisateur polonais Jerzy Kucia. Elle voit à travers cet art la possibilité de réunir sa passion de la peinture et son désir de faire des films. Autodidacte, elle apprend son métier d’animatrice dans un studio d’animation de Mumbay en réalisant des publicités. Parallèlement à ce travail alimentaire, elle commence un travail personnel sur son temps libre, elle réalise en 2002 son premier court métrage Orange. C’est avec son deuxième court métrage Prainted Raimbow que son travail est reconnu, elle reçoit de très nombreux prix tant dans son pays qu’à l’étranger. Prainted Raimbow est notamment primé à la Semaine de la Critique à Cannes.                                                                                                                            Au delà des projets aboutis, Gitanjali Rao présente deux films qui n’ont pu être finalisés faute de financement. Elle a travaillé pendant plus d’un an avec la firme Walt Disney à une adaptation du Mahabharata transposé dans le monde contemporain. Elle a aussi réalisé les premiers plans de Girgit qui raconte l’histoire de trois jeunes qui quittent leur village natale pour travailler dans une grande ville. Elle espère pouvoir reprendre ce projet en un long métrage.

Un des personnages de Shadows of Mahabharat (2010)

Le méchant de « Shadows of Mahabharat « (2010)

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Les deux personnages principaux de  » Shadows of Mahabharata » (2010)

Ce qui passionne Gitanjali Rao est de mettre les arts traditionnels indiens au centre de sa démarche artistique. Elle découvre grâce à Internet les styles des différentes régions de son immense pays et s’en inspire pour son animation : les miniatures indiennes, la peinture de Madhubani, les marionnettes en cuir découpé de Karnataka, les peintures murales… Son dernier court métrage True Love Story a lui aussi été sélectionné à la Semaine de la Critique à Cannes en 2014. Il n’a pas actuellement de distributeur en France, c’est un véritable privilège de le découvrir sur un grand écran.

gitanjali-rao-true-love-story-shortTrue Love Story nous propose à nouveau un voyage entre le réel et le rêve à travers la rencontre de deux jeunes vendeurs des rues. Il souligne aussi le danger que peut représenter Bollywood comme unique source d’évasion. Au delà des images lumineuses, j’ai été marquée lors de la projection par l’intensité réaliste de la bande son. Nous sommes comme les protagonistes agressés par la circulation intensive de la ville qui détruit les vies. Lors des questions du public, Gitanjali Rao dévoile son rêve de travailler à une co-production entre l’Inde et la France. Vivement qu’elle soit entendue !

Rencontre avec François Schuiten et Benoît Peeters…

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François Schuiten, Adrien Genoudet et Benoît Peeters au Centre Wallonie-Bruxelles

L’automne est flamboyant pour le duo des Cités obscures. Ils sont sous les feux de l’actualité avec la sortie du deuxième tome de Revoir Paris et une très belle exposition au Musée des arts et métiers, Machines à dessiner. A cette occasion, le centre Wallonie-Bruxelles organisait une rencontre avec les deux auteurs et Adrien Genoudet, coréalisateur d’un documentaire sur leur travail à quatre mains.

Il est commun de penser que le scénariste et le dessinateur interviennent successivement dans l’élaboration d’une bande dessinée. Schuiten et Peeters font exploser cette représentation, en effet ils réalisent ensemble la conception de l’histoire par un dialogue au long court. C’est une méthode « casse gueule », l’histoire peut leur échapper, toutefois ce risque est aussi le garant d’un plaisir renouvelé. Le film d’Adrien Genoudet et de Guillaume Diamant-Bergé, A quatre mains, donne à voir l’intimité de leur démarche artistique. Il a été tourné en un jour dans la maison de François Schuiten au mois de mars 2016. Les réalisateurs ont mis en place un procédé d’enregistrement simple pour se fondre dans le décor et se faire oublier. Ils ont pu ainsi capter les paroles, les gestes et les regards de Schuiten et de Peeters pendant l’élaboration des dernières planches de Revoir Paris, La nuit des constellations.

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« A quatre mains  » de Guillaume Diamant-Bergé et Adrien Genoudet

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A quatre mains, Guillaume Diamant-Bergé et Adrien Genoudet, 2016

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Dernières pages de Revoir Paris , La nuit des constellations, Casterman, 2016

L’image est au coeur de leur démarche. Albert Robida, Winsor McCay hantent leur panthéon visuel. L’excellente vidéo réalisée pour l’exposition du Musée des arts et métiers, Naissance d’une affiche, dévoile les photographies documentaires qui côtoient les multiples crayons sur la table de dessin de François Schuiten.

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Naissance d’une affiche, Vladimir Peeters, 2016

La relation de Kârinh aux images est une métaphore de leur travail. Comme eux, l’héroïne de Revoir Paris se shoote aux images, elle rêve, elle voyage à travers elles…

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Revoir Paris, Schuiten et Peeters, 2014

Pour Peeters, la case de BD est une petite maison. On est invité à entrer dedans, à l’habiter, à l’explorer, à chercher des détails. Voir une image est une démarche active.

Enfin, Schuiten et Peeters ont un grand plaisir à concevoir des expositions, le travail de scénographe prolongeant leur travail d’auteur. Machines à dessiner montre la fabrique de leur travail, dévoile le lien entre réel et imaginaire qui les anime et donne envie à tout un chacun de s’emparer d’un crayon.

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La salle de dessin, Machines à dessiner, Musée des arts et métiers

Vous avez jusqu’au 26 février pour découvrir Machines à dessiner 

Les livres illustrés et les films d’animation de l’institut Kanoun

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Logo du studio Kanoun, Iran

Intriguée par le logo animé qui annonce les courts métrages des contes de la mère poule, j’ai été ravie d’assister à la conférence donnée par Bamchade Pourvali au Forum des images le mois dernier sur l’Institut pour le Développement Intellectuel des Enfants et des Adolescents, l’institut iranien Kanoun. Particulièrement intéressée par les liens entre les livres illustrés et le cinéma d’animation, j’ai choisi dans cette très riche présentation des oeuvres d’artistes qui sont à la fois illustrateur et réalisateur.

L’idée première de l’institut Kanoun, créé en 1964, était de favoriser la traduction, l’édition et la diffusion de livres en direction de la jeunesse à travers un large réseau de bibliothèques. Les bibliothèques se sont rapidement transformées en centre d’art proposant des activités artistiques de plus en plus variées aux enfants ;  cinéma, musique, danse, théâtre…                                                                                                                                                        Un des premiers livres marquant de l’institut a été la création en 1967 de l’album Le petit poisson noir par l’écrivain Samad Behrangi et l’illustrateur Farshid Mesghali.

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Paru en 2006 aux éditions Grandir

Le petit poison noir est un être de désir, il veut savoir comment se termine le cours d’eau dans lequel il vit avec sa mère. Contre l’avis de cette dernière, il décide de suivre le fil de l’eau et d’atteindre l’océan. Au cours de son voyage il fait de nombreuses rencontres avec différentes créatures qui peuplent la rivière… Pour Bamchade Pourvali, cet album introduit l’une des philosophies essentielles de l’institut Kanoun, inviter les enfants à sortir de leur cadre habituel pour aller à la rencontre de la vie.

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pelicanCe récit initiatique est accompagné de magnifiques linogravures de l’artiste Farshid Mesghali qui réalisera par la suite le premier dessin animé produit par le Kanoun, Agha-ye Hayoola (M. Monstre) en 1970 .                                                                                       Petit poisson noir remporte en 1969 le grand prix du livre pour enfants de Bologne.

Le deuxième album présenté par Bamchade Pourvali est Les corbeaux de l’écrivain Nader Ebrahimi et de l’illustrateur Noureddin Zarinkelk.

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L’illustration de la couverture rappelle le court-métrage du dessinateur Chaval, Les oiseaux sont des consque devait connaître Noureddin Zarinkelk ayant étudié l’animation en Europe auprès de Raoul Servais. Les fleurs du tapis est un autre album réalisé par ce duo d’auteurs. L’illustration, d’un style très différent de l’album précédent, est un hommage à l’art du tapis iranien.

les-fleurs-du-tapis2Le premier film réalisé en Iran par Noureddin Zarinkelk est un petit bijou surréaliste qui enchaîne à un rythme trépidant de multiples métamorphoses : le penseur de Rodin côtoie la statue de la Liberté mais aussi un mollah et une femme voilée.


Quatre plus tard, il réalise Amir Hamzeh et le Zèbre qui est une oeuvre majeure selon Bamchade Pourvali. Ce film rassemble de nombreux éléments de la culture iranienne : les miniatures, la musique, la danse et aussi la figure du diable…


Un autre artiste fondateur du Studio d’animation Kanoun est Ali Akbar Sadeghi, les miniatures iraniennes et les légendes du Livre des Rois sont à la source de ses illustrations et de ses films.abdolrazagh-palhevan


Le dernier film d’animation présenté est l’oeuvre du cinéaste Sohrab Shahid-Saless qui s’inspire directement de la technique de la pixilation inventée par Norman McLaren. La durée du film est de quatre minutes, nous ne pouvons en voir qu’un court extrait.


Tous les films réalisés dans le cadre de l’institut Kanoun, quelque soit leur durée, étaient accompagnés à leur sortie par une affiche. C’est Abbas Kiarostami qui est l’auteur de celle du film de Sohrab Shahid-Saless, un bel exemple de son talent de graphiste.

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Abbas Kiarostami, Noir et blanc, 1972

Pour ceux qui aimeraient continuer cette découverte… De nombreux courts métrages d’animation réalisés dans le cadre de l’institut Kanoun ont été édités en DVD par les distributeurs suivants : Les films du préau, Les films du Whippet et Les films du paradoxe.

« A bonne école » AFCA / RECA

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L’AFCA a concocté avec la complicité du Réseau des Ecoles françaises de Cinéma d’Animation (RECA) un programme de huit courts métrages qui met à l’honneur le travail des étudiants. Huit films de fin d’études réalisés entre 2010 et 2014 qui brillent par leur diversité tant au niveau des genres et des techniques que des styles explorés.                 Les talents individuels et le travail collectif sont la richesse de ce programme à découvrir sans tarder ! Petits florilèges d’images et de vidéos pour découvrir les réalisateurs de demain…

"Rhapsodie pour un pot au feu" / Gobelins

« Rhapsodie pour un pot au feu » / Gobelins       Making of

Meet the myth / ArtFX

« Meet the myth » / ArtFX       Making of

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« Luz » / Ecole Pivaut, d’autres images

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« Les pieds verts » / La poudrière      scénario


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« La sole, entre l’eau et le sable » / ENSAD


La fine équipe de "Foward, March !" / ESMA

La fine équipe de « Foward, March ! » / ESMA

"Plato" / ENSAD

, EMCA »Plato » / ENSAD


Affiche

« Franck Krabi » / EMCA


Balade italienne autour d’Adam et Eve…

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Détail de l’oeuvre sculptée de Filipo Calendario, Palais Ducal de Venise

Parmi toutes les oeuvres admirées en Italie, il en est une qui est ancrée en moi depuis plusieurs années, Adam et Eve chassés du Paradis de Masaccio. Sa profonde humanité la rend intemporelle et me touche au delà des siècles. Que voit-on exactement sur cette fresque ?

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« Adam et Eve chassés du Paradis terrestre » de Massacio, la chapelle Brancacci, 1424-1428, Florence

La composition est simple, le premier couple de la Genèse est surmonté par l’ange Gabriel, Adam et Eve viennent de franchir un portique blanc et marchent sur un sol aride. La scène représente l’expulsion du paradis terrestre. L’archange vêtu de rouge porte une épée d’une main et désigne de l’autre la direction opposée au portique, l’expulsion se fait manu militari. Un faisceau de traits sort du portique, il rappelle l’origine divine de la sentence et le rôle d’intermédiaire de l’ange Gabriel. Si la lumière divine n’atteint plus le couple, il est toutefois enveloppé d’une belle lumière qui provoque des ombres portées derrière lui. On ne voit pas l’origine de cette lumière, on peut imaginer qu’elle provient du monde réel qui va accueillir les deux fugitifs. Adam et Eve sont en mouvement, s’ils marchent d’un même pas, leurs gestuels diffèrent. Adam a la tête baissée, il se cache les yeux, il ne veut pas voir. Eve, quant à elle, lève son visage, un cri semble sortir de ses lèvres entrouvertes. De ses mains elle cache son sexe et ses seins, elle ne veut pas être vue. La question du corps féminin tentateur n’est pas loin !

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Détail, « Adam et Eve chassés du Paradis terrestre » de Masaccio, la chapelle Brancacci, 1424-1428, Florence

Ils viennent de vivre un épisode tragique, leur détresse est réelle toutefois elle ne les terrasse pas. Malgré leur accablement, ils sont en marche vers une vie nouvelle que l’on peut espérer riche de désirs et de savoirs. Cette fresque appartient à un cycle qui illustre la vie de saint Pierre exécuté pour la décoration de la chapelle Brancacci (Eglise de Santa Maria del Carmine à Florence) par trois artistes majeurs, Masaccio mais aussi Masolino et Filippino Lippi. Il est intéressant de comparer la fresque de Masaccio à celle de Masolino qui représente, quant à elle, l’épisode précédant l’expulsion, La tentation d’Adam et Eve.

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« La tentation d’Adam et Eve » de Masolino, la chapelle Brancacci, 1424-1428, Florence

Les corps nus et les visages d’Adam et Eve sont ici idéalisés, ils ressemblent plus à des êtres fictifs qu’à des êtres réels. Leurs regards et leurs gestes sont inexpressifs, ils ignorent notamment le serpent au dessus d’eux. Le paradis terrestre remettrait-il en question la présence au monde réel et à la vie ?

On retrouve cette scène dans le groupe sculpté à l’angle du Palais ducal de Venise. Cette oeuvre plus ancienne a été réalisée par Filipo Calendario (1315-1355). Le jeu des comparaison est toujours riche d’enseignements et peut se poursuivre à l’infini.

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On trouve les mêmes éléments dans les deux oeuvres : l’arbre de la connaissance du bien et du mal représenté par un figuier, un serpent à tête humaine et le célèbre couple. Si dans l’oeuvre de Masolino, l’arbre est à la gauche d’Adam et Eve, dans l’oeuvre sculptée il les sépare, son feuillage recouvrant leur sexe. Dans la représentation de Calendario, le serpent s’adresse exclusivement à Eve qui porte dans sa main un fruit de l’arbre. De son autre main, elle désigne clairement son compagnon, voulant l’associer à la faute qu’elle s’apprête à réaliser. Lui répond au geste d’Eve par un autre geste déclinant toute responsabilité. Sentiment irrésistible et amusant d’être face à un dialogue gestuel que nos amis italiens pratiquent avec bonheur !

Aux galeries dell’Académia de Venise, on peut voir un tableau de Tintoret sur ce même motif.

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Adam et Eve du Tintoret, 1551, Galerie dell’Académia, Venise

Adam et Eve se font face au premier plan de la toile, ils sont assis chacun sur un petit muret de pierre. Les obliques des corps s’inscrivent dans l’oblique opposée du paysage vu en perpective. Eve prend appui sur l’arbre et tend à Adam le fruit défendu représenté ici par une pomme. La lumière met en valeur le corps laiteux d’Eve. Son geste et son expression sont calmes, ils contrastent avec le mouvement de recul d’Adam. La lumière souligne la torsion de son corps que l’on voit de dos. Le serpent n’est visible que par sa gueule qui porte une autre pomme. Cette scène occupe les trois quarts de la toile. Une autre scène figure à l’arrière-plan, sa petite dimension pourrait la rendre inaperçue.

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Détail, Adam et Eve du Tintoret, 1551, Galerie dell’Académia, Venise

Un homme et une femme nus sont poursuivis par un ange auréolé de lumière. On retrouve dans ce détail la conséquence à l’action représentée au premier plan, Adam et Eve sont chassés du paradis terrestre pour avoir goûter le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Une vision qui résonne avec celle de Masaccio.

D’autres oeuvres recueillies lors de notre séjour en Toscane et à Venise… une collection qui ne demande qu’à s’agrandir !

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