Felice Varini, entre Asnières et Gennevilliers

un autre point de vue "six arcs en scène" de Varini le 5 juin 2012

L’art contemporain est au bout de la ligne 13, station Gabriel Péri plus exactement. Dès la sortie du métro, vous êtes accueillis par les flèches conçues par Daniel Buren qui tels les cailloux blancs du Petit Poucet vous conduisent devant le théâtre de Gennevilliers.

Flèche Buren

Les façades de l’avenue des Grésillons sont étranges, des fragments rouges sont collés ici et là sans ordre apparent.

Avenue des Grésillons fragment " six arcs en scène " de Varini

Avenue des Grésillons fragment " six arcs en scène " de Varini

Félice Varini a peint une forme, six arcs de cercle rouges, en utilisant l’espace urbain comme support. Il inverse la démarche des peintres de la Renaissance. Ceux-ci cherchaient à représenter sur une surface plane un espace tridimensionnel en utilisant les lois de la perspective.

école hollandaise du XVII e siècle blog de Gilles Chambon

Varini, lui, veut donner l’impression d’une forme à deux dimensions sur un support réel à trois dimensions. Il y parvient en utilisant un point de vue unique que l’on peut comparer à l’oeil photographique. Où s’est-il placé pour projeter sa forme dans l’espace ? Le jeu peut commencer, trouver le point de vue qui va rendre cohérents les fragments épars. Si le point de vue à trouver est fixe, le corps du spectateur est en mouvement, il exécute un véritable ballet pour ajuster position et vision. Mais quelle jubilation quand la forme s’impose à nos yeux !

"Six arcs en scène" de Varini photo prise le 5 juin 2012

Voici la photo mémoire de l’expérience, je vais utiliser son imperfection pour vous proposer un autre jeu que j’affectionne, le jeu des différences avec la photo officielle !

Six arcs en scène de Felice Varini Photo André Morin

Après le plaisir du jeu, l’envie de mieux connaître l’artiste et les différentes étapes de son projet s’impose. Le site du T2G met à notre disposition une riche documentation visuelle.

Ne quittez pas l’avenue des Grésillons sans pénétrer à l’intérieur du théâtre, le food’art est fermé jusqu’en juillet mais des nourritures spirituelles vous attendent au premier étage. Depuis son arrivée à la direction du théâtre, Pascal Rambert entretient un lien fort avec les arts plastiques en invitant notamment des photographes à accompagner sa saison culturelle. Supports de communication, les photographies de Valérie Jouve puis de Nan Goldin ont fleuri dans la ville au lancement de chaque nouvelle saison depuis 2007. Certaines de ces photographies sont exposées à l’intérieur du théâtre, à découvrir ou à revoir !

Photos de Valérie Jouve au T2G

Photos de Nan Goldin au T2G

 

4 réflexions au sujet de « Felice Varini, entre Asnières et Gennevilliers »

  1. J’ai quand même du mal à voir ce que Felice Varini apporte de plus que Georges Rousse ! A ce degré ahurissant de similitudes dans la démarche artistique, c’est bien plus que de l’inspiration. Finalement dans l’art contemporain aussi il y a des suiveurs.

    • Les démarches de ces deux artistes ont effectivement de nombreux points communs, y compris un lien avec la ville de Gennevilliers. Georges Rousse est en effet intervenu en 1995 dans un lieu proche de la Galerie Manet pour réaliser une photographie qui fait partie maintenant du fonds municipal d’Art contemporain. Donc, oui, je suis d’accord avec vous, leurs démarches présentent de nombreuses similitudes ( pour s’en convaincre, il suffit de rendre visite à leur site respectif) à une différence près qui est la conception même de l’oeuvre. Pour Rousse, l’oeuvre est photographique, l’espace d’intervention n’est pas accessible au public. Pour Varini, l’oeuvre est l’espace même de l’installation. Il ne réalise pas lui même la photographie qui rend compte du point de vue unique, elle est signée par le photographe André Morin. Je ne sais si l’un est le suiveur de l’autre, ils s’inscrivent en tous les cas, tous les deux, dans l’histoire des illusions optiques. Je n’ai pas pensé à Georges Rousse lorsque je me suis promenée mardi dernier dans l’avenue des Grésillons mais j’ai pensé à l’émerveillement ressenti devant la coupole en trompe l’oeil de l’église Saint Ignace de Loyola à Rome ( réalisée en 1685 par le peintre Andrea Pozzo). Pour conclure, qu’on ne me demande pas d’opposer l’un à l’autre, moi, j’aime les deux !

  2. Merci pour votre réponse mais je reste troublé. Rousse a commencé son travail spécifique sur les anamorphoses au milieu des années 90.
    Il s’est passé exactement la même chose avec Charles Matton dont un artiste s’est totalement inspiré pour ses propres œuvres, au point qu’on peut les confondre avec celle de Matton. Pareil avec le land artist Andy Goldsworthy. Personnellement, cela me gêne beaucoup.
    Pour revenir à Rousse, dans ses dernières créations (mais pas seulement), le spectateur prend place dans l’œuvre. Et je trouve que cela fonctionne d’ailleurs moins bien. L’anamorphose, comme la perspective conique, exige un seul œil et un seul point de vue autrement les raccords ne sont jamais parfaits et l’illusion incomplète. En ce sens l’appareil photo remplit parfaitement cette fonction. Il me semble également que Rousse est autant un photographe d’architecture qu’un plasticien, et que sa démarche pose des questions sur nos perceptions, le support et le système photographique lui-même. Comme le faisait d’ailleurs le travail de Charles Matton. Il me paraît dommage de ne retenir que la forme, comme semble le faire Varini.
    Quoi qu’il en soit, bravo pour votre très joli site et votre talent à faire partager vos enthousiasmes. Je repasserai de temps en temps.
    PS J’apprécie comme vous le travail d’Edward Burtynsky.

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