Les livres illustrés et les films d’animation de l’institut Kanoun

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Logo du studio Kanoun, Iran

Intriguée par le logo animé qui annonce les courts métrages des contes de la mère poule, j’ai été ravie d’assister à la conférence donnée par Bamchade Pourvali au Forum des images le mois dernier sur l’Institut pour le Développement Intellectuel des Enfants et des Adolescents, l’institut iranien Kanoun. Particulièrement intéressée par les liens entre les livres illustrés et le cinéma d’animation, j’ai choisi dans cette très riche présentation des oeuvres d’artistes qui sont à la fois illustrateur et réalisateur.

L’idée première de l’institut Kanoun, créé en 1964, était de favoriser la traduction, l’édition et la diffusion de livres en direction de la jeunesse à travers un large réseau de bibliothèques. Les bibliothèques se sont rapidement transformées en centre d’art proposant des activités artistiques de plus en plus variées aux enfants ;  cinéma, musique, danse, théâtre…                                                                                                                                                        Un des premiers livres marquant de l’institut a été la création en 1967 de l’album Le petit poisson noir par l’écrivain Samad Behrangi et l’illustrateur Farshid Mesghali.

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Paru en 2006 aux éditions Grandir

Le petit poison noir est un être de désir, il veut savoir comment se termine le cours d’eau dans lequel il vit avec sa mère. Contre l’avis de cette dernière, il décide de suivre le fil de l’eau et d’atteindre l’océan. Au cours de son voyage il fait de nombreuses rencontres avec différentes créatures qui peuplent la rivière… Pour Bamchade Pourvali, cet album introduit l’une des philosophies essentielles de l’institut Kanoun, inviter les enfants à sortir de leur cadre habituel pour aller à la rencontre de la vie.

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pelicanCe récit initiatique est accompagné de magnifiques linogravures de l’artiste Farshid Mesghali qui réalisera par la suite le premier dessin animé produit par le Kanoun, Agha-ye Hayoola (M. Monstre) en 1970 .                                                                                       Petit poisson noir remporte en 1969 le grand prix du livre pour enfants de Bologne.

Le deuxième album présenté par Bamchade Pourvali est Les corbeaux de l’écrivain Nader Ebrahimi et de l’illustrateur Noureddin Zarinkelk.

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L’illustration de la couverture rappelle le court-métrage du dessinateur Chaval, Les oiseaux sont des consque devait connaître Noureddin Zarinkelk ayant étudié l’animation en Europe auprès de Raoul Servais. Les fleurs du tapis est un autre album réalisé par ce duo d’auteurs. L’illustration, d’un style très différent de l’album précédent, est un hommage à l’art du tapis iranien.

les-fleurs-du-tapis2Le premier film réalisé en Iran par Noureddin Zarinkelk est un petit bijou surréaliste qui enchaîne à un rythme trépidant de multiples métamorphoses : le penseur de Rodin côtoie la statue de la Liberté mais aussi un mollah et une femme voilée.

Quatre plus tard, il réalise Amir Hamzeh et le Zèbre qui est une oeuvre majeure selon Bamchade Pourvali. Ce film rassemble de nombreux éléments de la culture iranienne : les miniatures, la musique, la danse et aussi la figure du diable…

Un autre artiste fondateur du Studio d’animation Kanoun est Ali Akbar Sadeghi, les miniatures iraniennes et les légendes du Livre des Rois sont à la source de ses illustrations et de ses films.abdolrazagh-palhevan

Le dernier film d’animation présenté est l’oeuvre du cinéaste Sohrab Shahid-Saless qui s’inspire directement de la technique de la pixilation inventée par Norman McLaren.

Tous les films réalisés dans le cadre de l’institut Kanoun, quelque soit leur durée, étaient accompagnés à leur sortie par une affiche. C’est Abbas Kiarostami qui est l’auteur de celle du film de Sohrab Shahid-Saless, un bel exemple de son talent de graphiste.

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Abbas Kiarostami, Noir et blanc, 1972

Pour ceux qui aimeraient continuer cette découverte… De nombreux courts métrages d’animation réalisés dans le cadre de l’institut Kanoun ont été édités en DVD par les distributeurs suivants : Les films du préau, Les films du Whippet et Les films du paradoxe.

« A bonne école » AFCA / RECA

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L’AFCA a concocté avec la complicité du Réseau des Ecoles françaises de Cinéma d’Animation (RECA) un programme de huit courts métrages qui met à l’honneur le travail des étudiants. Huit films de fin d’études réalisés entre 2010 et 2014 qui brillent par leur diversité tant au niveau des genres et des techniques que des styles explorés.                 Les talents individuels et le travail collectif sont la richesse de ce programme à découvrir sans tarder ! Petits florilèges d’images et de vidéos pour découvrir les réalisateurs de demain…

"Rhapsodie pour un pot au feu" / Gobelins

« Rhapsodie pour un pot au feu » / Gobelins       Making of

Meet the myth / ArtFX

« Meet the myth » / ArtFX       Making of

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« Luz » / Ecole Pivaut, d’autres images

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« Les pieds verts » / La poudrière      scénario


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« La sole, entre l’eau et le sable » / ENSAD


La fine équipe de "Foward, March !" / ESMA

La fine équipe de « Foward, March ! » / ESMA

"Plato" / ENSAD

, EMCA »Plato » / ENSAD


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« Franck Krabi » / EMCA


Balade italienne autour d’Adam et Eve…

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Détail de l’oeuvre sculptée de Filipo Calendario, Palais Ducal de Venise

Parmi toutes les oeuvres admirées en Italie, il en est une qui est ancrée en moi depuis plusieurs années, Adam et Eve chassés du Paradis de Masaccio. Sa profonde humanité la rend intemporelle et me touche au delà des siècles. Que voit-on exactement sur cette fresque ?

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« Adam et Eve chassés du Paradis terrestre » de Massacio, la chapelle Brancacci, 1424-1428, Florence

La composition est simple, le premier couple de la Genèse est surmonté par l’ange Gabriel, Adam et Eve viennent de franchir un portique blanc et marchent sur un sol aride. La scène représente l’expulsion du paradis terrestre. L’archange vêtu de rouge porte une épée d’une main et désigne de l’autre la direction opposée au portique, l’expulsion se fait manu militari. Un faisceau de traits sort du portique, il rappelle l’origine divine de la sentence et le rôle d’intermédiaire de l’ange Gabriel. Si la lumière divine n’atteint plus le couple, il est toutefois enveloppé d’une belle lumière qui provoque des ombres portées derrière lui. On ne voit pas l’origine de cette lumière, on peut imaginer qu’elle provient du monde réel qui va accueillir les deux fugitifs. Adam et Eve sont en mouvement, s’ils marchent d’un même pas, leurs gestuels diffèrent. Adam a la tête baissée, il se cache les yeux, il ne veut pas voir. Eve, quant à elle, lève son visage, un cri semble sortir de ses lèvres entrouvertes. De ses mains elle cache son sexe et ses seins, elle ne veut pas être vue. La question du corps féminin tentateur n’est pas loin !

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Détail, « Adam et Eve chassés du Paradis terrestre » de Masaccio, la chapelle Brancacci, 1424-1428, Florence

Ils viennent de vivre un épisode tragique, leur détresse est réelle toutefois elle ne les terrasse pas. Malgré leur accablement, ils sont en marche vers une vie nouvelle que l’on peut espérer riche de désirs et de savoirs. Cette fresque appartient à un cycle qui illustre la vie de saint Pierre exécuté pour la décoration de la chapelle Brancacci (Eglise de Santa Maria del Carmine à Florence) par trois artistes majeurs, Masaccio mais aussi Masolino et Filippino Lippi. Il est intéressant de comparer la fresque de Masaccio à celle de Masolino qui représente, quant à elle, l’épisode précédant l’expulsion, La tentation d’Adam et Eve.

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« La tentation d’Adam et Eve » de Masolino, la chapelle Brancacci, 1424-1428, Florence

Les corps nus et les visages d’Adam et Eve sont ici idéalisés, ils ressemblent plus à des êtres fictifs qu’à des êtres réels. Leurs regards et leurs gestes sont inexpressifs, ils ignorent notamment le serpent au dessus d’eux. Le paradis terrestre remettrait-il en question la présence au monde réel et à la vie ?

On retrouve cette scène dans le groupe sculpté à l’angle du Palais ducal de Venise. Cette oeuvre plus ancienne a été réalisée par Filipo Calendario (1315-1355). Le jeu des comparaison est toujours riche d’enseignements et peut se poursuivre à l’infini.

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On trouve les mêmes éléments dans les deux oeuvres : l’arbre de la connaissance du bien et du mal représenté par un figuier, un serpent à tête humaine et le célèbre couple. Si dans l’oeuvre de Masolino, l’arbre est à la gauche d’Adam et Eve, dans l’oeuvre sculptée il les sépare, son feuillage recouvrant leur sexe. Dans la représentation de Calendario, le serpent s’adresse exclusivement à Eve qui porte dans sa main un fruit de l’arbre. De son autre main, elle désigne clairement son compagnon, voulant l’associer à la faute qu’elle s’apprête à réaliser. Lui répond au geste d’Eve par un autre geste déclinant toute responsabilité. Sentiment irrésistible et amusant d’être face à un dialogue gestuel que nos amis italiens pratiquent avec bonheur !

Aux galeries dell’Académia de Venise, on peut voir un tableau de Tintoret sur ce même motif.

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Adam et Eve du Tintoret, 1551, Galerie dell’Académia, Venise

Adam et Eve se font face au premier plan de la toile, ils sont assis chacun sur un petit muret de pierre. Les obliques des corps s’inscrivent dans l’oblique opposée du paysage vu en perpective. Eve prend appui sur l’arbre et tend à Adam le fruit défendu représenté ici par une pomme. La lumière met en valeur le corps laiteux d’Eve. Son geste et son expression sont calmes, ils contrastent avec le mouvement de recul d’Adam. La lumière souligne la torsion de son corps que l’on voit de dos. Le serpent n’est visible que par sa gueule qui porte une autre pomme. Cette scène occupe les trois quarts de la toile. Une autre scène figure à l’arrière-plan, sa petite dimension pourrait la rendre inaperçue.

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Détail, Adam et Eve du Tintoret, 1551, Galerie dell’Académia, Venise

Un homme et une femme nus sont poursuivis par un ange auréolé de lumière. On retrouve dans ce détail la conséquence à l’action représentée au premier plan, Adam et Eve sont chassés du paradis terrestre pour avoir goûter le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Une vision qui résonne avec celle de Masaccio.

D’autres oeuvres recueillies lors de notre séjour en Toscane et à Venise… une collection qui ne demande qu’à s’agrandir !

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Georges Rousse au Festival du regard

couvUn lieu exceptionnel, le Manège Royal de Saint-Germain-en-Laye, accueille, le temps du Festival du regard, 12 images au format imposant de l’artiste Georges Rousse. Nous sommes envahis par un sentiment de beauté et de plénitude ; est-ce l’espace qui magnifie les oeuvres ou est-ce le lieu qui est magnifié par elles ? Depuis les années 80, Georges Rousse développe une pratique artistique singulière, il crée des anamorphoses dans des lieux désaffectés. Il rend compte de son intervention uniquement par la photographie, les lieux n’étant pas accessibles au public. Seul le point de vue photographique réunit les formes éclatées et dispersées dans l’espace investi. Deux anamorphoses récentes réalisées grâce à la technique du collage complètent cette rétrospective des premières oeuvres picturales.

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Bercy, 1985                                                                              

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Argentan, 1997

Abbaye-de-Fontevraud, 1985

Abbaye-de-Fontevraud, 1985

Anglards, 2016

Anglards, 2016

Un film passionnant pour découvrir le processus de création des installations de Georges Rousse réalisé lors de son intervention dans la base sous-marine de Bordeaux en 2014.


Michèle Lemieux, Le tout et la partie…

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Ecran Dowd ou Petit écran conçu et fabriqué par Alexandre Alexeïeff et Claire Parker en 1937

Michèle Lemieux est l’une des rares artistes à maîtriser cet instrument incroyable qu’est l’écran d’épingles. Auteur reconnue d’albums pour enfants et professeur de dessin et d’illustration à l’école de design de l’université du Québec, elle entre dans le monde du cinéma d’animation lorsque l’ONF lui propose d’adapter son livre, Une nuit d’orage. Ce très bel album alterne des phrases percutantes et des dessins en noir et blanc. Chaque double page traduit les interrogations d’une petite fille sur le sens de la vie…

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Imagine si on pouvait changer de corps… Extrait d' »Une nuit d’orage », 400 coups, 2013 (première édition 1996)

En 2003, elle réalise son premier court métrage. Le mouvement, la couleur et le son s’invitent dans sa ballade philosophique et poétique. Elle rencontre alors le cinéaste Jacques Drouin qui l’initie à l’écran d’épingles. En 2012, elle sort son deuxième court métrage réalisé avec cette technique d’orfèvre, Le grand ailleurs et le petit ici.

L’exposition qui lui est consacrée au Centre culturel canadien est remarquable. Orchestrée par la photographe Angela Grauerholz, elle se déploie sur deux espaces. Le rez-de-chaussée présente sa méthode de travail : les lectures qui l’accompagnent, son métier d’enseignante et surtout des centaines de dessins et de notes.

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Mais aussi Bachelard, Jung, Borges, Calvino, Kentridge…

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Vidéo sur un cours de dessin à l’UQAM de Montréal

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Hommage à d’autres artistes : illustrateur, musicien, cinéaste

Une sélection de 100 doubles pages extraites des carnets d'esquisses

Une sélection de 100 doubles pages extraites de ses carnets d’esquisses

Dialogue entre la commissaire et l'artiste, deux collègues, deux amies...

Dialogue entre la commissaire et l’artiste : deux collègues, deux amies…

Les salles de l’étage, plongées dans l’obscurité, sont dédiées à son travail sur l’écran d’épingles, elles mettent en valeur le dialogue qu’elle entretient avec cet instrument ancien. L’usage d’une nouvelle et d’une ancienne technologie lui permet de rendre sensible des thèmes universels et intemporels.

Vidéo montrant l'alliance entre l'écran d'épingles et l'informatique.

Vidéo montrant l’alliance entre l’écran d’épingles et l’informatique.



« Musique et cinéma » Master class du jour le plus court

Jacques Kermabon, Pierre-Luc Granjon, Timothée Jolly

Jacques Kermabon, Pierre-Luc Granjon et Timothée Jolly

Jacques Kermabon, rédacteur en chef du magazine Bref, rappelle que la musique fait partie intégrante du cinéma dès les premières projections du théâtre optique d’Emile Reynaud. Celui-ci avait en effet, demandé au compositeur Gaston Paulin, des partitions originales, pour accompagner au piano ses pantomimes lumineuses présentées au cabinet fantastique du musée Grévin. Après cette courte introduction historique, c’est la rencontre artistique entre le réalisateur Pierre-Luc Granjon et le compositeur Timothée Jolly qui est à l’honneur lors de cette master class dominicale présentée au Carreau du Temple : Comment la musique s’accorde au cinéma…                                                                                                   C’est dans la ville de Lyon que tout commence, Pierre-Luc Granjon est étudiant à l’école d’Arts Appliqués, il assiste aux ciné-spectacles donnés par La Cordonnerie, il apprécie particulièrement la musique créée par Timothée Jolly. Lorsqu’il écrit l’histoire de son premier court métrage, Petite escapade, il ne connaît rien à la post-production mais a envie de confier la musique de son film à Timothée et à son complice Denis Mignard. Ses directives sont très simples, il indique les morceaux qu’il aime le plus dans leur musique et précise les moments qui doivent être accompagnés…

Petite escapade de Pierre-Luc Granjon, 2001

Petite escapade de Pierre-Luc Granjon, 2001

La musique proposée est un hommage aux films muets. Les personnages qui défilent sur le trottoir, sous les yeux attentifs du jeune garçon, sont accompagnés chacun d’un instrument différent. Les instruments utilisés (scie musicale, batterie-bassine, ukulélé…) s’accordent parfaitement avec l’esprit fait main des décors et des personnages réalisés avec du grillage et du papier mâché. Quelques années plus tard, ils collaborent à nouveau pour le court métrage Le Loup blanc. Avant même de voir les premières images du film, Timothée envoie à Pierre-Luc un CD avec des musiques qu’il vient de composer. Pierre-Luc « flache » sur un morceau. Les accords se font par hasard, cette musique accompagnera la scène de l’enterrement.

Le loup blanc de Pierre-Luc Granjon, 2006

Le loup blanc de Pierre-Luc Granjon, 2006

Les premières minutes du court métrage sont visionnées avec uniquement la voix test. La projection intégrale de la version finale nous permet de prendre conscience de l’apport du bruitage et de la musique. Son utilisation est plus parcimonieuse que sur Petite escapade, l’usage de la musique ou son arrêt mettent en valeur une scène. L’absence de musique peut en effet provoquer l’imaginaire de chaque spectateur. Par exemple, la scène où le petit garçon galope sur le dos du loup n’a pas besoin d’un accompagnement musical, l’image se suffit à elle même. A l’inverse, la musique permet de créer des sensations profondes, Pierre-Luc voulait par exemple donner le sentiment que la forêt est un personnage en soi. Pour ce faire, les musiciens ont travaillé la matière sonore afin de créer des nappes de sons très graves en grattant les cordes du piano et du violoncelle. Le spectateur est plongé alors dans une expérience sensorielle totale.

Le temps est passé très vite en compagnie de ces deux complices qui manifestent un réel plaisir du travail partagé. Je ne sais pas si la musique s’accorde au cinéma, mais ce réalisateur là et ce compositeur là sont sur la même longueur d’onde artistique pour notre plus grand plaisir.

L’exposition Varda/ Cuba au Centre Pompidou

L'exposition Varda / Cuba au Centre Pompidou, 11/11/15- 01/ 02/16

L’exposition Varda / Cuba au Centre Pompidou, 11/11/15- 01/ 02/16

Agnès Varda effectua un séjour à Cuba à la fin de l’année 1962. De cette expérience, elle réalisa un film documentaire, Salut les Cubains, sortit en 1964. La nouvelle exposition de la galerie des photographes nous raconte la genèse passionnante de ce film. Son originalité est, qu’en dehors de quelques prises directes utilisées pendant le générique, il est constitué d’un montage d’images fixes. L’exposition met en scène le film terminé et un ensemble de photographies.

Vue générale de l'exposition Varda / Cuba

Vue générale de l’exposition Varda / Cuba

Certaines séquences ont été réalisées en rafale, notamment celles qui portent sur la danse ou sur le chanteur, Benny Moré. Dans le film, ces dernières reconstituent un mouvement saccadé, elles constitueraient de magnifiques flipbook !

Benny Moré par Agnès Varda, l'exposition Varda / Cuba au Centre Pompidou

Benny Moré par Agnès Varda, l’exposition Varda / Cuba au Centre Pompidou

L’exposition est accompagnée d’un très beau livre qui nous informe notamment sur l’importance de la musique pour le montage des images. Un regard et une voix singulière pour un très beau voyage !

Varda / Cuba , Editions du Centre Pompidou, Editions Xavier Barral, 2015

Varda / Cuba , Editions du Centre Pompidou, Editions Xavier Barral, 2015


Qui a peur des femmes photographes ?

femmesDeux musées parisiens, le musée de l’Orangerie et le musée d’Orsay, consacrent aux femmes photographes une vaste exposition au titre intrigant : Qui a peur des femmes photographes ? Clin d’oeil à la chanson du court métrage Les trois petits cochons de Walt Disney, ce titre nous interroge sur la visibilité du travail des femmes artistes. Deux lieux, deux époques (1839-1919 / 1918-1945), l’oeuvre de plus de 150 photographes est présentée dans une scénographie thématique passionnante. Comme dans toute exposition collective de cette ampleur, chaque spectateur se crée un parcours personnel, édifiant son propre Panthéon. Voici le mien !

La première grande dame de mon parcours est sans conteste la photographe américaine pictorialiste, Gertrude Käsebier. Elle installe, dès 1897, son propre studio à New York, ouvrant la voie du professionnalisme à de nombreuses femmes. Ses photographies d’enfants et notamment celles avec son petit-fils Charles O’Halley renouvellent ce genre intimiste. Le portrait est l’activité principale de son studio, son regard sur ses modèles révèle leur force individuelle. Deux portraits d’amérindien sont notamment remarquables, the red man et celui sur la jeune activiste sioux, Zitkala Sa. Loin des clichés ou de l’attrait de l’exotisme, c’est l’individu dans sa singularité qui l’intéresse et qui nous touche un siècle plus tard.

La route vers Rome de Gertrude Käsebier, 1902

La route vers Rome de Gertrude Käsebier, 1902

Zitkala Sa de Gertrude Käsebier, vers 1898

Zitkala Sa de Gertrude Käsebier, vers 1898

Les deux oeuvres reproduites sur les affiches des expositions sont de deux artistes anglaises. Si la première est connue, Julia Margaret Cameron est en effet une des rares photographes du XIX ème siècle à connaître la postérité, la deuxième, Madame Yevonde, est une totale inconnue pour moi. Et pour le moins, son oeuvre interpelle ! Pionnière dans l’usage de la photographie couleur, elle expérimente le processus Vivex couleur dans des mises en scènes audacieuses. N’hésitant pas à utiliser de la glycérine pour représenter des larmes, son portrait de Lady Campbell semble être un photogramme d’un film.

Lady Campbell as Niobe de Madame Yevonde, 1935

Lady Campbell as Niobe de Madame Yevonde, 1935

Quelques cinéastes sont d’ailleurs présentes dans l’exposition. On peut voir notamment un extrait du film réalisé en 1923 par Germaine Dulac La souriante Madame Beudet, considéré comme le premier film féministe. Un photogramme de son film surréaliste La coquille et le clergyman est aussi exposé.  Une grande dame qui reste à découvrir !


Je suis enfin attirée par deux photographies de l’artiste américaine, Barbara Morgan. Dans sa collaboration avec des chorégraphes ou dans son travail plus abstrait, Barbara Morgan expérimente de nouvelles techniques comme la surimpression de négatifs ou le light painting pour représenter le mouvement dans une image fixe. Passionnant !

We are Three Women - We are Three Million Women de Barbara Morgan, vers 1935

We are Three Women – We are Three Million Women de Barbara Morgan, vers 1935

Pure Energy and Neurotic Man de Barbara Morgan, 1945

Pure Energy and Neurotic Man de Barbara Morgan, 1945

J’ai aussi retrouvé avec intérêt des photographies d’artistes ayant bénéficié d’une exposition personnelle au Jeu de Paume au cours de ces dernières années : Berenice Abbott, Laure Albin Guillot, Diane Arbus, Eva Besnyö, Claude Cahun, Florence Henri, Germaine Krull et Lisette Model…

La maison de l’Amérique Latine propose, quant à elle, jusqu’au 12 décembre une exposition dédiée à Lola Alvarez Bravo. Le travail des femmes photographes sort-il de l’indifférence ?

Indeferencia de Lola Alvarez Bravo, vers 1940

Indeferencia de Lola Alvarez Bravo, vers 1940