Les éditions de L’école des loisirs viennent d’enrichir leur catalogue avec une pépite, l’album Kiosque réalisé par l’artiste lettone Anete Melece. Découvert l’an dernier alors que je travaillais sur le court métrage éponyme dont l’album est une adaptation, je rêvais que les lecteurs de langue française puissent à leur tour avoir ce bel objet en main, c’est chose faite !
Anete Melece a imaginé l’histoire de la plantureuse Olga coincée dans son kiosque à journaux après deux années à créer des images publicitaires dans une agence de design packaging. Elle gagnait bien sa vie mais le sentiment « d’être au mauvais endroit » l’a envahie peu à peu. Elle s’est mise à rêver d’autre chose…
… et finalement elle a décidé de quitter son travail alimentaire pour se former à l’animation et à l’illustration à la HSLU (université des Sciences appliquées et des Arts), une école publique de Lucerne en Suisse. Pendant ses études, elle a développé l’histoire d’Olga sous la forme d’un court métrage animé. Son film de fin d’étude lui a permis de réaliser le rêve d’Olga, voyager… … dans les festivals du monde entier.
The Kiosk from Anete Melece on Vimeo.
J’aime cette histoire aux multiples résonances. Le désir de liberté qui anime Olga et qui lui permet de se mettre en mouvement nous touche particulièrement en ces temps de confinement imposé. Chacun, petits et grands, se retrouve dans ce portrait quels que soient ses bloquages et ses envies d’ailleurs.
Si de nombreux auteurs d’albums ont donné une nouvelle vie à leur histoire en les animant, le chemin inverse est plus rare et souvent décevant. Le changement de médium effectué par Anete Melece est ici remarquable. Elle a entrepris l’adaptation de son film sept ans après sa sortie. Ce laps de temps important lui a permis d’envisager son histoire avec un oeil nouveau. Elle a pris la décision de ne pas utiliser des images extraites du film mais d’en créer de nouvelles. L’alternance d’images en vignettes et d’images plein cadre créé un rythme intéressant, le lecteur peut moduler sa lecture et prendre le temps d’explorer de grands tableaux.
La nécessité de condenser un évènement en une seule image impose de nouveaux choix formels, de point de vue, de cadrage et de format. Elle impose aussi de trouver des astuces pour figurer le mouvement en démultipliant par exemple le personnage comme dans la page ci dessous qui figure la trajectoire d’Olga sur la rivière.
Le passage du film au livre a aussi nécessité l’écriture d’un texte, le court métrage étant sans parole. Ce texte émane du regard chaleureux que porte Anete Melece sur son personnage principal nous la rendant éminemment sympathique. Enfin, la couverture du livre a été conçue avec soin par l’ancienne designeuse. Une découpe de l’encadrement du kiosque permet de passer de l’intérieur à l’extérieur en ouvrant et fermant la couverture. Quelle sera la nouvelle destination d’Olga ?