Fascinée par l’oeuvre d’Oscar Fishinger, j’avais très envie d’aller au Centre Pompidou-Metz découvrir le travail d’un autre grand nom du cinéma expérimental, Hans Richter. La rétrospective qui lui est consacrée est foisonnante et didactique, elle permet une approche complète d’un artiste qui m’était alors connu que par son film Rythme 21.
Dans un entretien filmé, Hans Richter donne les conditions matérielles dans lesquelles son film a été tourné : une table avec deux lampes de chaque côté, une caméra fixe au dessus et une multitude de rectangles et de carrés blancs, noirs ou gris, de toutes tailles. L’exposition permet de comprendre le processus de création dans lequel Richter s’est engagé avec son ami Eggeling et dont Rythme 21 est une étape clé : simplification à l’extrême des formes et des couleurs pour dépasser l’unité statique d’un tableau de chevalet, emprunt à la musique de la notion de contrepoint… « Avec le film, nous nous confrontions non seulement à l’orchestration de la forme mais aussi à ses relations au temps. L’unique image disparaissait dans un flot d’images qui ne se justifiait que s’il aidait à l’expression d’un nouvel élément : le temps. […] On pouvait aisément diviser et « orchestrer » le simple carré de l’écran de cinéma. Ces divisions ou parties pouvaient alors être orchestrées dans le temps en prenant le rectangle de la « toile-film » d’une manière formelle et temporelle. En d’autres termes, je continuais avec l’écran ce que j’avais fait depuis des années avec la toile. Ce faisant, je trouvais une nouvelle sensation : le rythme qui est, je le pense toujours, la sensation maître de toute expression de mouvement… » (Extrait de Magazine of Art,1952)
A partir de 1926, Richter introduit dans ses films des images photographiques à côté des images de formes abstraites.
Je découvre avec jubilation son film Vormittagsspuk (fantômes avant déjeuner 1927). Encadré par le cadran d’une horloge, l’action se déroule entre 10h00 du matin et midi. Que se passe t-il ? Sous l’impulsion de quatre chapeaux melons, les objets semblent doués subitement d’une vie propre et n’en font qu’à leur tête ! En digne héritier de Méliès et compagnon des surréalistes, Richter joue avec les trucs que lui permet la caméra : prises de vue » image par image », prises de vue en marche arrière, démultiplications, images négatives…
Au delà du cinéaste, l’exposition permet de découvrir l’éclectisme de Ritcher tant dans son refus de s’enfermer dans une forme ou un courant artistique que dans sa collaboration à des projets communs (revue, exposition, film). J’ai découvert aussi qu’un artiste conceptuel pouvait être amusant !